Zébuline | 26/03/2023

+ de genres, c’est aussi pour les ados

Par Ludovic Tomas – 26 mars 2023

Zébuline. Votre dernière création Anima aborde la question de l’identité de genre avec une adresse particulière au public préadolescent. Quels messages, quel propos voulez-vous transmettre à travers cette pièce ?

Christian Ubl. Le cheminement de l’identité est confus quand on est adolescent. On essaie plein de choses, on se cherche, on est tenté par différents styles vestimentaires… Une partie de la jeune génération se revendique genderfluid (la fluidité du genre, ndlr), c’est-à-dire ni d’un genre ni de l’autre. Un désaccord peut exister entre son corps, ses désirs, son image, ses sentiments profonds. Anima propose de communiquer ensemble autour de ces questions, pour trouver sa place dans les questionnements identitaires quand on n’est pas toujours à l’aise dans ses baskets. La pièce prône la confiance en soi pour transcender la tolérance. Elle défend l’idée qu’il faut être ouvert et curieux même si l’apparence est différente de ce à quoi on est habitués. Elle montre aussi que le regard de l’autre est plutôt bienveillant. Qu’il faut favoriser la rencontre et ne pas agir de manière catégorique ou en fonction de la famille dans lequel on a grandi ou de ses fréquentations. 

Ces questions étant beaucoup plus abordées aujourd’hui, on sait qu’elles peuvent provoquer des drames. Est-ce une des raisons qui vous a conduit à aborder cette thématique ?

Beaucoup de choses se passent, se révèlent sur la toile et les réseaux sociaux. Elles sont donc plus visibles aujourd’hui qu’il y a quinze ans mais cela reste un sujet délicat. Les transformations qui s’engagent pendant l’adolescence, les situations excluantes ou les drames qui existent m’ont convaincu qu’il fallait que cela remonte à la surface et essayer de créer un terrain de jeu pour en parler, pour poser des mots et non pas évacuer le sujet. Dans le spectacle, on entend des messages audios inspirés de témoignages en ligne. C’est un spectacle festif, joyeux et encourageant.

Anima © Nicolas Martinez Châteauvallon-Libetré

La dimension musicale et vocale est aussi importante. Que vient-elle apporter à l’expression chorégraphique ?

La voix fait partie de l’expression du corps. A l’adolescence, la tonalité change. C’est aussi un médium pour témoigner ou pour brouiller les pistes. Quant à l’utilisation de chants anciens avec des musiques plus pop, cela permet un grand écart.

Quand on s’adresse à un public jeune sur un tel sujet, se fixe-t-on des limites, des interdits ?

L’enjeu était de pousser la thématique et à la fois de ne pas aller trop loin. Si le sujet n’est pas lié à la sexualité mais à l’identité, on voulait tout de même montrer des corps tels qu’ils sont. C’est pour cela que les danseurs portent des combinaisons chair intégrales qui montre la différence des formes et en même temps des corps asexués. Cela s’adresse aux préadolescents donc ce n’est pas non plus tout lisse. Plus ces thématiques sont cloisonnées, plus elles restent « communautaires ».