PARISART

Biennale de danse du Val-de-Marne | LDF – Langues de feu & Lames de fond
16 Avr – 17 Avr 2019

Par Claire Astier

Pièce chorégraphique expérimentale, LDF – Langues de feu & Lames de fond de Christian Ubl, prend les traits d’un diptyque poético-sociologique. Avec deux soli pour s’engouffrer dans la brutalité de l’histoire contemporaine. Celle du feu des révolutions arabes qui finit noyé dans la Méditerranée.


Avec LDF – Langues de feu & Lames de fond (2019), le chorégraphe Christian Ubl (Cie CUBe association) livre deux poèmes-documentaires. Soient deux portraits chorégraphiques co-créés avec l’autrice Lucie Depauw. Chorégraphe autrichien basé à Marseille, c’est pour le festival Actoral 2016 que Christian Ubl a entamé ce projet en co-création avec Lucie Depauw. Avec, d’abord, l’écriture de Langues de feu (2016). Une pièce autour de la danse et du feu ; autour de la langue et de la révolte. « … Quand mon visage aura fondu. Méconnaissable. Charbon. Quand certains se demanderont. Qui. Est cette flamme. Alors vous leur direz. Je m’appelle Tarek. Et j’attends. Le printemps… ». Des mots brûlants, en conclusion de la note d’intention de Langues de feu, en 2016. Car cette première pièce était déjà articulée par le feu des soulèvements : celui des révolutions Arabes de 2010.

LDF – Langues de feu & Lames de fond : deux poèmes-documentaires chorégraphiques

Traînées de poudre ayant embrasé une partie du bassin méditerranéen, l’espoir des lendemains meilleurs a rapidement cédé la place à une forme de chaos. Et LDF – Langues de feu & Lames de fond s’inscrit dans le prolongement de ces convulsions culturelles. Quand, face à des pays à feu et à sang, des milliers de personnes se jettent à l’eau. Double solo se répondant l’un l’autre, LDF – Langues de feu & Lames de fond plonge dans l’élémentaire. Le feu, l’eau, la fuite, la mort, la puissance de l’instinct de survie. Projet chorégraphique hybride, le diptyque LDF s’apparente à une forme de poème sociologique et politique.

© Fabrice Cattalano

En mêlant notamment, danse, écriture, arts plastiques et réseaux sociaux. Un projet expérimental pour une réalité qui déborde. « Le printemps arabe avait commencé par le feu, il s’achève dans l’eau, prend l’eau, un tsunami humain qui tente la traversée et le déplacement. »

LDF de Christian Ubl et Lucie Depauw : un projet hybride, chorégraphico-sociologique

Interprétés par Christian Ubl et Sandrine Maisonneuve, les deux soli mobilisent des couvertures de survie comme éléments omniprésents. Et tandis qu’habituellement, il est demandé aux spectateurs d’éteindre leur téléphone et de ne pas prendre de photo, avec ou sans flash, ici l’inverse s’accomplit. Libre aux spectateurs de filmer, de retransmettre la captation de ces deux poèmes chorégraphiques en live. Acte en prise directe avec l’actualité, LDF – Langues de feu & Lames de fond embarque ainsi les publics dans une expérience sensorielle. Entre la fulgurance des révolutions trahies et l’énergie désespérée de celui qui se jette à l’eau, comme dernier recours. Deux soli qui donnent chair à l’abstraction. Du désir sensuel à l’immolation ; du mur aquatique au bercement de l’eau, peut-être ad vitam aeternam. Pour deux témoignages poétiques, où la danse, l’art et la langue partent en quête de l’élémentaire : le feu, l’eau, mais surtout l’humanité.